lundi, avril 07, 2008

la vie est une jungle

En pur produit de notre bon monde libéral, je suis flexib', comme mec. Je m'adapte, en souplesse et sans arrière-pensées, à mon petit environnement. C'est ainsi que, comme tout bon parisien qui se respecte, je me suis très bien fait au métro.
Je sais, nombreuses sont les personnes sensibles qui ne s'épanouissent pas dans cet environnement parfois un peu trop convivial. Mais là où beaucoup ne voient que lumières blafardes, visages fermés et odeurs suspectes, je ne pense que "déplacement sans soucis, peu onéreux et écologique" et surtout "heure de lecture quotidienne assurée".
Seulement, il est un être vil qui hante les wagons de métros qui me donne des sueurs froides et me réveille parfois la nuit., Un monstre de bêtise et d'égoïsme que je déteste presque à l'égal du manipulateur de trolley inconscient. Une plaie pour l'humanité, quoi.

Figurez vous un métro normalement rempli. J'entend par là qu'on doit pouvoir y entrer sans trop de peine, et pouvoir y lire sans trop de gêne (dès lors qu'avec un peu de métier, on sait se placer correctement, évidemment. Qu'on sait par exemple repérer la dame de petite taille qu'on pourra acculer d'un coup de coude bien placé pour se créer son petit espace à soi, enfin vous voyez ce que je veux dire quoi, c'est l'enfance de l'art). Je ne postule quand même pas un wagon où l'on peut s'assoir, il ne faut pas non plus se placer dans des conditions trop idylliques.
Nous voila donc modérément comprimés, plutôt bien répartis dans le wagon, et chacun vaque à sa petite lecture matinale. Histoire de vous planter le décor, ça signifie typiquement 30% de lecteurs de Métro, 30% de lecteur de 20 minutes (on déconne pas avec la pluralité de l'information), 10% de Figaro (je vais vers la Défense, je vous rappelle), 10% de Micro Hebdo (je vais vers la Défense, je vous rappelle!), 10% d'Anna Gavalda (les filles libre-penseuses) et 10% d'Harlan Coben (les mecs libres penseurs).

Nous constatons donc, que sur la base de rites complexes et de normes remontant à la nuit des temps (et qui échappent aux touristes de passages, récoltant par la même des regards haineux bien mérités), les usagers chevronnés que nous sommes avons su spontanément nous organiser pour occuper aussi bien que possible l'espace. Quatre à six sur chaque barre disponible, et tout le monde est content.
Quand soudain entre l'être vil. Parisien lui aussi jusqu'au bout des ongles, il n'éveille pas la méfiance de l'autochtone que je suis. D'un pas assuré, il se taille lui aussi sa place, donne lui aussi un discret petit coup de coude à la dame de tout à l'heure, dégaine son Figaro (je vous ai dit qu'il était vil!) et...

Au lieu de prendre le poteau à pleine main, ce beau poteau poisseux que des milliers de voyageurs ont pris avant lieu ce même jour, et que des milliers de voyageurs prendront après lui, voila qu'il s'y adosse!
Le fourbe. L'enfoiré. Le salopiot! Comme ça, l'air de rien, monsieur se créée sa petite place trois étoiles, et peut confortablement consulter les cours de la Bourse comme si le métro était quasi-vide.

Mais ce faisant, les quatre autres voyageurs dont l'intégrité physique dépend de ce contact avec le poteau, vital à chaque accélération/décélération, se voient confrontés à une alternative insoluble. Ou bien ils migrent vers d'autres poteaux, tristes et défaits, et devront batailler de plus belle pour gagner un espace acceptable. Ou bien ils restent sur leur poteau d'origine, du bout des doigts, et doivent supporter le contact corporel du malotru.

Evidemment, vous qui ne connaissez pas les pactes secrets de la vie parisienne, vous suggéreriez d'interpeler le quidam pour lui expliquer le problème... Mais non, malheureux, jamais on ne se parle dans ce genre de situation.
Le seul échapatoire envisageable consiste à remuer la main prisonnière de la manière la plus insupportable possible pour le goujat. De fermer le poing pour lui faire une méchante boule dans le dos, là où il est le plus vulnérable. Mais pour peu qu'il soit plongé dans le cours du Nasdaq, qu'il ai de gros problèmes de sudations ou qu'il prenne goût à ce type de torture, et nous voila impuissants, battus, déconfits, penauds. Reste plus qu'à retourner pourchasser la petite dame de tout à l'heure.
Elle va prendre cher, d'ailleurs. Elle payera pour l'autre. Non mais.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

je le crie haut et fort et sans aucune honte : j'ai aimé "ensemble c'est tout" (le bouquin of course) et je vous emm... !!! et même que ça m'a été conseillé par d'autres copines libres-penseuses et qu'on n'a rien à envier aux mecs qui lisent le Spiegel, car nous aussi on a des lectures intellos, on ne lit pas que Elle et Glamour. Bon, pas QUE.

ZeVinci a dit…

Si je la choppe celle là je suis file un bon coup de coude!

Anonyme a dit…

Et ben qu'il essaie car, pour qui y s'prend ce mec qui traverse la Défense, sans costume cravate en dénigrant les pas libres-penseurs(ses),les libres-penseurs(ses)et les petites vieilles? Il se met dans quelle catégorie ce Monsieur? au-dessus de tous? Non, mais, oui, elle est bien Gavalda et même qu'elle a envoyé balader les journalistes dernièrement, au salon du livre, pour privilégier la causette avec ses lecteurs. Il en connait beaucoup qui font ça aujourd'hui? Ben, que les libres penseuses s'unissent pour s'adosser à tous les poteaux du métro en lisant la consolante (son dernier bouquin)!!!!!!!!!

Anonyme a dit…

oueeee fondons la ligue des libres penseuses!! (mais sinon vinci t'as raison pour l'attrapeur de poteau).

ZeVinci a dit…

Et beh...
J'ignorais que cette grande Anna Gavalda avait un fan club si militant.
Peace les filles. Je respecte vos goûts de merde.

Anonyme a dit…

moi aussi je lis gevalda et j'aime beaucoup!

Par contre, si elle parle pas aux journalistes, je pense que c'est plus pour cultiver une absence médiatique et un coté mysterieux plus profitable aux ventes de ses bouquins.. un peu comme muriel barbery, dont j'aime aussi l'écriture pour "libre-penseuses"..