vendredi, février 01, 2008

Millenium et Monde

Je suis en train de dévorer le troisième (et malheureusement dernier) tome de Millenium de Stieg Larsson, dont je vous ai parlé plus bas. J'ai déjà vanté ces polars dont le rythme est très particulier, et qui ne ressemblent à rien de connu: l'auteur peut prendre des centaines de pages pour planter des personnages ou décrire des ambiances; ils peut mêler des intrigues diverses, de style et d'importance variable.
Une des composantes de ses histoires porte sur les malversations financières, les manipulations dans les comités de direction pour prendre le pouvoir sur telle ou telle boîte, et pour faire des sousous de manière pas toujours propre. L'auteur étant journaliste, ces magouilles se passent occasionnellement au sein de gros journaux.

Pourquoi vous dis-je cela (outre le plaisir de repasser une couche sur Millenium)?
Et bien parce que je viens enfin de comprendre les embrouilles qui sont en train de se jouer au Monde, et qu'elles ont comme un air de famille avec les fictions dont je me délecte en ce moment. Quand on suit l'actualité du Monde de loin, on a juste l'impression d'une crise liée à des difficultés financières, qui pousse les journalistes à défendre 1- leur poste menacé par un plan social 2- d'obscures idéaux d'indépendance face à d'éventuels nouveaux actionnaires.
Et bien c'est bien plus grave que cela. J'ai appris le détail de la chose dans ce document très clair (7 pages), rédigé par des journalistes du Monde et repris sur le site de Plantu.

Il en ressort que le Monde risque de perdre son indépendance, alors même que ses statuts semblaient la lui garantir (la société des rédacteurs est majoritaire dans les prises de décisions). Cependant, ce solide postulat a peu à peu été émiété par Alain Minc. Dans un premier temps pour de bonnes raisons: le Monde avait besoin en 94 d'argent frais pour survivre, ce qui c'est fait en faisant entrer divers petits actionnaires extérieurs dans le capital du journal.
Seulement, au fil des ans, la direction du journal a eu la folie des grandeurs et a racheté divers autres titres (dont Télérama et Courrier international). Et il fallait toujours plus de sous pour financer ces emplettes, de sorte que certains petits actionnaires inoffensifs sont devenus gros et dangereux. A commencer par Lagardère, grand amateur de journaux (et ami de Sarkozy - tiens).

Et voici maintenant la crise de trop: une nouvelle recapitalisation amènerait les actionnaires extérieurs à dépasser la société des rédacteurs: ce serait la fin de l'indépendance.
Le descriptif des derniers soubressauts de ce thriller qui n'a rien à envier à Millenium sont particulièrement étonnants, et aussi détaillés sur arretsurimages.

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