samedi, juin 07, 2008

Hommage à Béranger

S'il ne doit rester qu'un type de post, ce sera visiblement un post musical. J'ai quelque peu affiné mon jugement sur les albums dont je vous avais parlé un peu plus bas, et il en ressort surtout que j'adore le dernier album de Portishead. Très exigeant dans la composition musicale expérimentale, l'album est rendu tout à fait accessible par la grâce de la voix fantomatique formidable de la chanteuse. C'est courageux, beau, original, bref, je suis conquis!
Mon jugement sur le dernier Moby (nul) et surtout le dernier dEUS (hélas moyen) n'ont pas contre pas changé.

A part cela, trois nouveaux albums me sont passés par les esgourdes. Les Tit Nassels, très bons sur scène, m'ont moyennement emballé sur leur dernier album: leurs voix se marient très bien, leurs textes sont parfois excellents, mais l'album est assez répétitif dans sa forme et inégal dans la pertinence des thèmes abordés. Jetez une oreille sur le formidable "Soixante millions de..." pour en entendre le meilleur.
J'ai pas mal apprécié le dernier Agnès Bihl, quoiqu'il ait aussi quelques défauts. Elle se complait un peu trop dans le rôle de la chipie mal aimée (dans ses textes), et dans l'exploration de thèmes très hards (la pédophilie par contre). Parfois, ça casse donc, mais heureusementça passe beaucoup plus souvent. Sa jolie gouaille, ses accompagnements bien sentis et sa plume militante et drôle donnent de très bons moments, tels Demandez le programme (en écoute sur son myspace) ou La complainte de la mère parfaite (qui me parle pas mal en ce moment).

De bonnes choses donc, mais qui sont malheureusement pour elles complétement écrasées par la révélation de cette moitié d'année pour moi: l'album hommage rendu à François Béranger. C'est bien là que je me rend compte de ma piètre culture musicale: après Allain Leprest, je suis bien heureux que la jeune génération de chanteurs me fasse découvrir les glorieux anciens.
Le parallèle avec Leprest est troublant: voila un autre grand de la chanson des décennies passées, qui a eu sa petite heure de gloire malgré une personnalité profondément a-médiatique, mais qui est complétement tombé dans l'oubli pour le grand public. Heureusement, les jeunes loups de la chanson française ont de la mémoire et Sanseverino, Loïc Lantoine, la rue Kétanou, Tryo, Jeanne Cherhal, Thiefaine ou encore Jamait le rappellent à notre bon souvenir.
La comparaison avec Leprest a aussi ses limites car leur style est assez fondamentalement différent. Là où le premier brille surtout par la poésie de ses textes (bien que son intégrité et ses engagements soient également au dessus de tout soupçon), Béranger coupe surtout le souffle par la dimension politique de ses chansons (bien que la qualité de son écriture soit tout à fait appréciable).
Bref, les 17 chansons de l'album m'ont franchement secoué. Des thèmes forts (l'Algérie, le vote protestataire, le rôle de la chanson... ou quelques sujets légers à l'occasion) traités de front, avec des mots terribles. Le titre de l'album est parfaitement choisi, même si c'est selon moi la seule mauvaise reprise de l'album. Béranger, le libertaire de service de la chanson dans les années 70, a eu il faut dire une vie qui ne prête pas à la tendresse. Ouvrier dans son jeune âge, il a été arrêté après quelques manifs et envoyé trois ans en Algérie. A son retour, il s'est d'ailleurs vite retrouvé en taule avant de se tourner vers la chanson. Tout cela est fort bien raconté dans la chanson Tranche de vie.
Talentueux, mais avant tout énervé, Béranger a par contre, comme Leprest, pas mal profité du coup de jeune donné à ses arrangements par la fine fleur de la chanson qui lui rend hommage. D'où un album énorme, où les chansons pétries de talent s'enchainent si vite qu'il faut une dizaine d'écoute pour en faire le tour.
Et comme s'il fallait en rajouter, Mell et Christian Olivier nous gratifient d'une perle absolue, la reprise de Manifeste. Intelligente, intègre, énervée, maline, marrante et brillante à la fois, cette chanson à elle seule justifierait l'achat de l'album. Un objet à ne pas rater, donc.

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