mercredi, décembre 10, 2008

Tchi tcha

Ah heureusement qu'il y a quelques valeurs sures pour nourrir le blog en temps de disette! Votre journée sera donc illuminée par une chronique ciné zeblogienne, nettement plus intéressante que le précédente fournée!

Mon dernier RTT de l'année m'a permis d'aller voir le dernier frères Coen, à sa première séance de diffusion: Burn after reading. Les frangins nous ont habitué à alterner films grandioses et personnels (type: No country for the old man), et des divertissements plus légers mais tout de même de très haut niveau (type Intolérable cruauté). Il faut dire qu'avec leur maitrise de la caméra, leur sens de l'humour noir et leurs amitiés très recommandables (Clooney par exemple), il faut presque le faire exprès pour ne pas réaliser de bons films!
Burn after reading est à classer dans la deuxième catégorie. Il s'agit d'une histoire d'espionnage déjantée où se croisent et s'épient espions ratés, érotomanes incontrolables et idiots complets typiquement coéniens. Cette galerie de personnage étant notamment défendue par Clooney, Malkovitch et un formidable Brad Pitt.
Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas complétement. Malgré les excellents acteurs, le ton familier aux Coens et quelques belles surprises, l'intrigue manque notablement de souffle. Reste un divertissement sympathique, là où on pouvait attendre beaucoup mieux.



Cette demie-déception étant évacuée, je peux vous parler des deux grands films que j'ai vu dernièrement. Commençons par Hunger.
Il s'agit de ce film-choc sur l'emprisonnement des activistes de l'IRA qui relate leurs tentatives pour se faire reconnaitre le statut de prisonniers politiques. Alors qu'on ne parle dans les médias quasiment que du dernier pan du film (la grève de la faim de Bobby Sands), deux autres aspects sont également couverts: la révolte des couvertures (les prisonniers de l'IRA refusaient de porter l'uniforme des criminels ordinnaires, et donc vivaient nus avec leur couverture) et leur grève de l'hygiène d'une part, et le quotidien des gardiens d'autre part (dedans et hors des murs).
Ce film a beaucoup fait parler de lui sur deux points: l'exceptionnelle maîtrise de son réalisateur débutant (artiste contemporain reconnu, comme quoi...) et l'horreur quasi-insoutenable qu'il montre. Une fois n'est pas coutume, je suis en accord complet avec les médias. Les sordides détails sur la grève de l'hygiène (murs couverts d'excréments notamment) et la longue agonie de Bobby Sands sont quasiment insoutenables. J'ai failli quitter le visionnage du film à la vingtième minute pour cause de hauts le coeurs.
Mais le jeu en vaut la chandelle. Car le film est non seulement extrêmement fort (il nous fait toucher du doigt l'horreur absolue qu'ont connu ces prisonniers et gardiens -et la force d'esprit insensée qu'ils avaient), mais en plus il est formidablement beau.
Insoutenable souvent, mais magnifique. Le cadre est sublime, la lumière splendide, les corps des prisonniers et gardiens superbement mis en valeur, et les quelques inventions de mise en scène tombent magnifiquement à propos (à part peut-être l'échappée onirique finale qui, si elle n'a rien de honteux, est un peu démonstrative). Outre ces qualités esthétiques, Steve MacQueen (c'est le réalisateur) mène impeccablement son histoire, contre-balançant le point de vue des prisonniers par le quotidien des gardiens par exemple, ou nous faisant pénétrer dans une cellule pour la première fois dans les pas d'un nouveau détenu.
Bref, un film fort et superbe, mais authentiquement très difficile à soutenir.



Dans un style moins hard-core, mais non moins engagé, nous sommes allés voir avec bonheur La vie moderne de Depardon, le dernier épisode du triptique documentaire que le photographe-réalisateur consacre au monde des petits paysans. Là aussi, la maitrise technique (bien plus discrète et subtile) est tout au service du propos du film.
Nous pénétrons avec Depardon dans l'intimité de quelques petits paysans, la plupart vieillissants, avec qui il a mis des années à se lier d'amitié et qui livrent donc, en toute franchise et toute simplicité, leur vision de leur vie et du futur des petits paysans.
Le film respire l'humanité, et plonge en quelques plans le plus citadins des spectateurs dans le charme et la dureté de la vie paysanne. Mais Depardon ne se contente pas de nous faire rencontrer des personnages formidables qu'on pourrait croire d'un autre temps (et de mener magnifiquement leurs interviews), il les filme avec un sens du cadre et des couleurs qui accouche d'images magnifiques (avec une mention spéciale à ce paysan à la chevelure iroquoise qui regarde l'enterrement de l'Abbé Pierre à la lumière de sa vieille teloche mal réglée). Et capte tous ces petits riens qui plantent le décors en un rien de temps (la café servi dans le verre Duralex, la vieille paysanne qui interromps sans cesse la conversation pour inciter le preneur de son à attaquer de toute urgence son gateau qui va refroidir, etc).
Du bonheur et un sens de la nostalgie qui vient d'on ne sait où.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Oui, la vie moderne, un grand bol de vraie vie, où on ressent la longueur du temps qui passe, le rythme des saisons, le microcosme que constitue la ferme du fait de son isolement et où on (re)découvre ses "taiseux" si caractéristiques des campagnes. Pas de parole inutile, pas de volonté de la ramener . . . ça fait un bien fou ! Sinon, dommage qu'il n'y ait pas d'extrait du film avec Brad Pitt, toujours aussi séduisant . . .

Anonyme a dit…

Scoop: "la vie moderne" vient de remporter le prix Deluc du meilleur film français de l'année !!!!! Trop bien !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!