lundi, avril 05, 2010

La Canaille



Nous arrivons à un de mes temps préférés de bloggeur émérite. Quand j'ai fait une découverte musicale incroyable, à laquelle j'adhère complètement, et que je peux la partager avec mon large lectorat.
Ce n'est pas tant que j'ai envie de me la péter "découvreur de talents" (quoique c'est vrai que c'est toujours un peu flatteur), mais c'est surtout que j'accroche tant à l'écoute de cet album que j'ai envie qu'un maximum de mes potes y jette une oreille - confiant que le talent du groupe en question fera le reste.
Ainsi donc, après les sommets que constituent Mr Roux, la Blanche et Batlik (voire Loïc Lantoine si on veut bien considérer qu'il n'était pas assez connu quand je l'ai mentionné), let me introduce... la Canaille!

Il s'agit d'un groupe de Montreuil, pas évident à classifier. Si le chant est clairement rap, la musique dépasse de loin la boîte à rythme et les samples répétitifs habituels. La formation de base est même franchement rock (guitare et basse), enrichie d'un solide sampler-scratcheur (ce qui nous ramène au hip-hop). Mais en outre, des amis violonistes, trompetistes et sytaristes se joignent à la fête, ce qui donne de chansons en chansons des colorations jazzs ou world. Vu la profondeur musicale du truc, c'est un peu rude de les limiter au qualificatif de rap!
Le plus simple est de consacrer quelques minutes à la petite sélection de leurs chansons que je vous ai amoureusement concoctée pour vous faire une idée de l'OVNI en question. Seule ma belle-sœur a su condenser l'essentiel de l'esprit de la Canaille en une courte définition qui, si elle n'est pas parfaitement exacte, restitue l'essentiel: c'est du rap gaucho.

En effet, l'intérêt premier de la Canaille ne vient pas pour moi de leur instrumentation (même si elle est de tout premier plan), mais des textes. Sérieusement, férocement, engagés. Mais aussi formidablement talentueux...
Même si j'ai une tendresse toute particulière pour les groupes engagés, je craignais de me lasser d'un groupe dont l'intégralité des textes suinte exclusivement la colère rouge. J'avais peur qu'un réquisitoire trop systématique ne tourne rapidement en rond sans spécialement faire avancer le schmilblick, à la façon de ces groupes adolescents dont l'analyse politique ne va pas plus loin que "casse toi Sarko" et "le racisme, c'est mal". C'est plutôt sympathique, mais ça ne s'écoute pas en boucle.
On en est loin ici. Les chansons varient les tons (parfois), mais surtout les angles pour chanter la colère sociale. Elles sont joliment amenées, bien construites et argumentées, et, disons le, contiennent de jolies et percutantes images poétiques ("le bruissement des pantoufles avant le bruit des bottes", pour ne citer qu'elle). Et elles gardent toujours cette infalsifiable sincérité de la révolte viscérale.
Fort, beau, et intelligent, quoi...

Et j'ajoute prolixe!
Car à peine écouté l'album que je me suis rué à leur concert. Je m'attendais à un moment fort, mais craignais que les garçons n'aient pas un répertoire permettant de tenir beaucoup plus d'une heure. Une heure de panard, c'est déjà énorme, me direz vous.
Et bien figurez vous que les garçons ont en plus la plume généreuse, puisqu'une bonne moitié des chansons ne sont pas présentes sur leur album. Et quel bonheur, de découvrir à cette occasion une brassée de textes tout aussi bien sentis et, chose rare, que l'on peut apprécier dès la première écoute!
Bref, je ne saurais trop vous conseiller de donner sa chance à ce grand groupe...

Plus accessoirement, la Canaille m'a donné l'occasion de me frotter à un public de concert de rap. Expérience partielle puisqu'une bonne partie de la salle était constituée, comme moi, de bobos attirés par les diffusions sur FIP ou France Inter. Mais malgré tout, l'avant scène de la première partie, 100% rap celle là, fut peuplée de jeunes à casquette au milieu desquels j'ai eu l'impression de faire tâche. J'y ai appris, par exemple, qu'apparemment on n'applaudit pas dans ce genre de concert, mais qu'on préfère ovationner un bras en l'air! je le note...
Cela dit, outre cette confrontation pittoresque, j'ai aussi eu l'impression que l'artiste en première partie - Swift Guad - n'avait pas non plus sa plume dans sa poche. Certains de ses textes, servis par une voix de dur whiskyteux (mais desservis par une musique bombomesque sans finesse), m'ont tant plus que je me suis offert son album.
Pour ceux d'entre vous qui 1- auraient écouté la sélection de la Canaille et 2- sauraient faire abstraction de l'imagerie de gros dur de rap bien stéréotypée, je conseille l'écoute (et pas trop la vision) de ce clip:


Et tant que j'y suis, j'expédie le reste de mon actualité musicale vite fait bien fait. C'est court, percutant et forcément injuste, mais je n'ai pas connu de grand choc à part la Canaille ce dernier trimestre.
Le live de Ben Harper est sympathoche, sans plus. L'album accoustique d'Arthur H vaut une écoute, mais n'égale pas les originaux. Le dernier album de Jeanne Cherhal est intéressant, mais pas à se rouler par terre.
Par contre, je me suis mis sur le tard à Izia, jeunette bombe rock. Tout en premier degré frontal comme il convient à ce style, c'est une boule d'énergie au talent vocal considérable. Je l'honore en ajoutant deux de ses morceaux à ma sélection. Côtoyer la Canaille après tout le bien que je viens d'en écrire, ça veut tout dire.

Aucun commentaire: