jeudi, octobre 22, 2009

Shutter Island


Une fois n'est pas coutume, j'ai fait des infidélités à Michael Connelly en lisant un polar contemporain dont j'avais entendu le plus grand bien: Shutter Island de Dennis Lehane. Je me sens toujours aussi bien auprès de ce bon vieux Harry Bosh et vous avais déjà expliqué à quel point j'appréciais le sérieux et le refus du tape-à-l'oeil des Connelly (comparé aux pseudo-maîtres du thriller qui tournent à un rebondissement toutes les dix pages).
Seulement, Shutter Island m'est arrivé auréolé d'un tel bouche-à-oreille que j'ai décidé de lui régler son compte avant la sortie de son adaptation cinématographique (prochain film de Scorsese avec Di Caprio, excusez du peu), afin de profiter de cette lecture sans que son dénouement n'ait été ébruité.

De fait, le cadre de l'histoire fait beaucoup plus dans le spectaculaire que les Connelly. Nous sommes en 1954 et suivons un policier qui va enquêter sur l'évasion d'une pensionnaire de la institution psychiatrique de Shutter Island. Cet hopital-prison mystérieux accueille les malades mentaux les plus dangereux des Etats-Unis et a carte blanche pour les traiter des manières les plus radicales qui soit. L'ambiance est d'autant plus tendue que la pensionnaire semble s'être évaporée de sa cellule et que le personnel est très peu coopératif.
Isolation, dépaysement historique, personnages barges... Bref, l'artillerie lourde est déployée, et je craignais d'être tombé dans un thriller à grand spectacle efficace mais sans finesse.

Alors, efficace, c'est indiscutable. On passe par moultes figures imposées du genre: le flic bourru rayonnant la testostérone, le médecin brillant mais ambigu, les dialogues lors desquels deux flics couillus se jaugent en peu de paroles, les yeux fixés sur l'horizon...
Mais dieu que cela est maîtrisé! On croit s'en rendre compte au fait qu'on est scotché au livre la plupart du temps, et qu'on y pense fréquemment le reste du temps. Comme il se doit dans ce genre de mécanique, mais sans que l'atmosphère de mystère et de tension ne soit jamais rompue (par des coups de théâtre stupides, par exemple).
Mais on comprend vraiment la dimension de la maitrise narrative quand le dénouement a lieu. Je ne vais pas trop en faire, disons simplement que je trouve que ça réussi le tour de force d'être très surprenant, tout en restant cohérent avec l'intégralité du livre. Et qu'on ne nous a pas amusé avec 200 rebondissements intermédiaires n'ayant aucun intérêt pour qui connait le fin mot de l'histoire.

J'évite de trop en faire car la meilleure façon de gâcher l'effet d'une belle fin (à part de la trahir) est de trop répéter qu'elle est formidable et imprévisible. Personnellement, j'ai vraiment été surpris et conquis, mais je pense que j'en aurais plus profité si je n'avais pas été prévenu. Et notamment si je n'avais pas perpétuellement cogité pour imaginer cette fameuse fin, ce qui m'a permis d'en entrevoir une partie.
Bref, vous avez jusque le mois de février pour dévorer cet excellent thriller, si possible sans vous creuser le citron plus que pour un autre polar. Ensuite, quelque chose me dit qu'une sortie au ciné vaudra le coup...

2 commentaires:

Lyvie a dit…

pas vraiment enthousiaste après la lecture du roman. J'ai préféré la BD que je viens de lire.

Johan a dit…

j'ai aimé la sensation d'être 'jeté' en continu entre le vrai et le faux, qu'en effet on se demande; "qu'est-ce qu'anormal?"...