mardi, octobre 20, 2009

Ingénieur 2000


Je croyais avoir quitté avec mon employeur précédent les formations-légales-à-la-con qui me tombaient alors à feu nourri sur le poil. Seulement, après deux années de relative tranquillité, un lointain responsable semble avoir eu la sotte idée de jeter un œil au touffu histogramme de notre société, et doit y avoir débusqué ma modeste équipe, tapie dans un coin sombre qui nous garantissait jusqu’alors la paix.
Toujours est-il qu’il ne se passe plus de semaine sans qu’un mail cryptique mais, renseignements pris, tout ce qu’il y a de plus officiel, sorte des mystérieuses entrailles du cyberespace d’entreprise et nous enjoigne de suivre une nouvelle cyber-formation obligatoire.

Mais de quelles formations vous cause-je ?
Afin de rafler de précieuses certifications dont raffolent nos chères entreprises, nos chefs les plus brillants n’hésitent pas à s’engager au nom de leur entreprise. Et comme on n’est pas certifiés « global star 5 B environmental label » comme ça, des milliers d’employés se retrouvent condamnés d’une signature un peu rapide à suivre un cours sur le sujet. Ca ne coûte rien sur le papier, ça fait même tout joli de dire ensuite que « l’ensemble de nos employés est sensibilisé à la démarche qualité des 5B via le diagramme de Smith ».

Seulement, l’employé n’a souvent que faire du diagramme de Smith, que ce soit dans sa vie professionnelle ou pour son intérêt personnel. Surtout que les formations en questions ont systématiquement deux choses en commun :
  • • D’être épouvantablement niaises. Bien qu’il suffise à tout être un peu sensé d’en lire l’intitulé pour être capable de faire le sans-faute au test final, on vous impose de passer par une longue succession de slides débilitants où l’on vous énonce les plus grandes évidences (on ne fait pas de blague raciste, on ne s’entend pas avec un concurrent pour se partager un marché, on ne prévient pas ses amis que l’action va monter dès que le patron il va annoncer un truc, etc).
Je vois deux conséquences à cette constatation. Soit il y a des décideurs pour qui tout cela n’était pas évident, et je me demande comment ils vont se comporter face à un cas non prévu dans les slides, quand il faudra se fier à leur seul compas moral. Soit ils voient leurs employés comme un troupeau de débiles profonds. Je ne sais quelle est la perspective la plus réjouissante.
  • • De ne s’adresser vraiment qu’à une petite sous-partie des employés. Celle qui compte. Celle à laquelle les décideurs tiennent tellement qu’ils en oublient même que de nombreux autres métiers contribuent à faire tourner leur boîte.
Et qui sont les heureux élus ? Je vous le donne en mille : les vendeurs, les financiers, et les chefs. Si tu n’as pas 30 personnes sous tes ordres, si tu n’es pas capable de jouer sur le prix de l’action, ou au moins de graisser la patte à quelques clients, tu as si peu d’intérêt qu’on ne va pas même faire l’effort de te sortir de la liste de formation obligatoire.

Je rêve d’une inversion des rôles… Plaidant pour ma paroisse, j’attends le jour où des financiers devront subir une formation d’ingénieurs. O-bli-ga-toire. Afin que la boîte soit certifiée Ingénieur 2000 !
On verrait des vendeurs suant sang et eau pour diagonaliser des matrices. Des chefs du personnel d’ennuyer ferme devant une formation neuneu sur le débogage. Et, oh oui, des commerçaux obligés de se pointer en jean et T-shirt au boulot quand ils ne reçoivent pas de clients. On leur interdirait même les lampes à bronzer et le dentifrice qui brille !

1 commentaire:

Une non suicidée a dit…

Ouh là, là, toi, tu ne veux pas que je te pistonne pour être pris en main par le cabinet Technologia? C'est vrai que ce cabinet a bq à faire en ce moment pour remettre de l'humain dans le management de FT et faire en sorte que chacun des salariés de ce Groupe retrouve un sens dans sa vie professionnelle. Mais je pense que si tu continues comme ça, va falloir qu'il ajoute d'urgence quelques milliers d'Euros à sa facture pour te mitonner un questionnaire destressant dont il a le secret! Allez, te prends pas la tête. Le monde changera un jour. C'est une question de patience et d'opportunité . . .