mercredi, août 19, 2009

Tu as, tu as toujours de beaux yeux


Quand les petits gars dans mon genre cherchent à sortir un petit peu le museau de leur puits d'inculture, ils doivent se frotter à quelques œuvres incontournables. Le cas du sieur Proust étant provisoirement réglé, je me tourne vers un antipathique auteur le décrivant aimablement, notre fin Marcel, comme un "mi-revenant (... qui) s'est perdu avec une extraordinaire ténacité dans l'infinie, la diluante futilité des rites et démarches qui s'entortillent autour des gens du monde, gens du vide, fantômes de désirs, partouzards indécis (...), chercheurs sans entrain d'improbables Cythères". Tranchante transition! Violent contraste entre de finesse décadente des salons et l'abrupte puanteur du pauvre!
Sachant l'impardonnable voie où l'auteur s'est laissé entrainer par la colère râgeuse, brillante et infatiguable qui agite ses lignes, j'ai longtemps hésité à entamer sa lecture. Il est des fréquentations que je ne peux souffrir. Quelque peu rassuré par la lecture d'articles datant son engagement dégueulasse et jusque-boutiste d'après la rédaction de son oeuvre maîtresse, je m'y suis tout de même aventuré du bout des doigts.
Je me suis retrouvé instantannément happé, soufflé, balancé de ci de là par une manière d'écriture sans concession qui mêle brillament un parlé très familier et des constructions recherchées. Qui vous prennent alternativement ou simultanément à l'intime, à la viande, le plus directement qui soi, ou bien vous proménent au firmament de finesses rhétoriques.
Voila qui donne souffle et force aux noires réflexions de l'auteur, et nous font suivre passionnément son médiocre héros des tranchées des Flandres au New-York anonyme des années 30, en passant par la moite Afrique coloniale.

1 commentaire:

Unknown a dit…

Décidemment, tes énigmes littéraires n'ont rien à envier à celles du Père Fourras ;-)