vendredi, juin 19, 2009

Bouffée d'optimisme


La lecture du Spiegel, pour enrichissante qu'elle soit, peut aussi frapper durement au moral. Voici quelques petits extraits de ma lecture de la semaine, que je trouve justes et d'autant plus désespérants qu'ils sont énoncés d'un ton neutre et objectif.

D'abord, issu d'un article d'analyse politique sur la branlée prise par le SPD (le PS allemand) aux Européennes, d'autant plus étonnant que le parti n'avait reculé devant aucune subvention mirobolante aux entreprises pour sauver leurs employés de la crise (Opel, Karstadt...) - et plaire à l'éclectorat, à quelques mois de l'élection du nouveau chancelier..
"Le SPD a dû se rendre à l'évidence dans les dernières semaines: le processus d'individualisation a largement atteint son électorat. Il n'y a plus de conscience de classe de l'Allemand d'en bas, plus de solidarité. L'opérateur travaille à la chaine chez Bayer ne se sentira pas spécialement concerné par l'ouvrier de chez Opel simplement parce que lui aussi travaille à la chaîne. Celui qui gagne le RMI préférerait de loin une hausse du RMI qu'un plan aide évitant le licenciement de la chaine de magasins Karstadt. Le parti des petites gens [le SPD, historiquement] n'a plus affaire à une clientèle cohérente, mais à toute une constellation de "Moi SARL" [nom donné aux entreprises de 1 personne]. Les faibles ne se serrent plus les coudes, et la crise amplifie la sensation du chacun pour soi. On peut se désoler de ce constat. Mais il ne faut pas l'ignorer."

Mais surtout, j'ai été quelque peu retourné par le dossier que le Spiegel consacre aux "enfants de la crise" - aux 20-35 ans. Ils se sont attaqué à la question avec une diligence toute allemande: un sondage de 50 questions à été largement diffusé, et donne lieu à 17 pages d'analyse.
Je vous ai sélectionné quelques extraits qui m'ont particulièrement frappé. En sortant de cette lecture, on n'a pas spécialement envie d'inviter des 20-35 ans à bouffer, et on ne prédit surtout pas un avenir radieux d'amour et de partage à la société, je peux vous dire...
"
Le plus étonnant dans cette génération, c'est qu'elle est invisible. Aucun visage connu ne vient à l'esprit quand on parle d'elle, il n'y a personne qui parle en son nom. Pas d'intellectuel, pas d'écrivain, pas d'artiste, pas de musicien. Chacun parle pour soi uniquement.
"
Puis:
"
Cette génération trouve le monde si compliqué qu'elle ne pense pas à le changer; les jeunes Allemands sont si individualistes que leur regard est porté exclusivement sur eux-mêmes: le monde peut courir à sa perte, ils arriveront bien à se débrouiller pour éviter le naufrage individuel. Et dans le cas contraire, leur échec sera de leur faute, et pas de celle du système.
... Un trait les caractérise: une énorme confiance en eux. Pas à leur génération en général, pas à la société. C'est la croyance qu'ils vont, personnellement, réussir, d'une manière ou d'une autre. 60% prédisent un avenir sombre à la société. Par contre, 73% se voient un futur personnel positif.
"
Ce point m'a particulièrement frappé parce que je pense la même chose, et à peu près tous les amis de mon âge avec moi. La société empire, mais notre situation personnelle, bon an mal an, va de mieux en mieux.
"
Ils sont apolitiques. Quand on le leur dit, 83% d'entre eux ne le prennent pas mal. La démocratie de partis ne les intéresse pas, et ils sont à des années lumières de rêver à la révolution.
[...]
Ce n'est pas qu'ils méprisent la politique, mais plutôt qu'ils ne voient pas pourquoi ils devraient s'occuper de choses qui n'ont visiblement rien à voir avec leur vie de tous les jours.
"

On n'est pas dans la merde, quoi...

3 commentaires:

Frangin a dit…

Bah alors, il est où le lien qui va bien pour aller voir ça de ses propres yeux ? Hein ? On se relâche ? On ne cite plus ses sources ?!

ZeVinci a dit…

Mon pov' vieux, ma source est un journal *papier*.
Et oui, on a tendance à l'oublier, mais tout ne se trouve pas sur internet!
Et paf.
ZeVinci jamais ne se relâche, comme dirait la jeune mariée (impressionée)

Une observatrice a dit…

Bien entendu, je ne ferai aucun commentaire sur la réponse du blogger à son frangin mais je confirme que les trentenaires qui m'entourent dans mon milieu professionnel sont dans la ligne de ce que le spiegel évoque. Individualistes, peu curieux du sort des travailleurs qui sont évincés de leur entreprise car, comme l'autruche, occultent. Sûr, en regardant ailleurs, le mauvais sort ne les atteindra pas. La politique, c'est tous pareil, pas un pour sauver l'autre, magouille et compagnie. Certes, l'info, celle qui informe vraiment et donne à réflèchir, faut la chercher ailleurs que dans le journal de 20h ou le torchon à la sortie du tram et ça, c'est fatiguant. Et puis, à quoi ça sert de se fatiguer puisque de toutes façons, "on n'y peut rien, c'est mondial". D'accord, manque un ou 2 leaders charismatiques pour aider ceux qui ont quand même un peu de jugeotte à se faire une vraie bonne idée. On n'est pas bien guidé, faut le reconnaître. Néanmoins, ça m'interpelle beaucoup d'être entourée de jeunes dont les neurones fonctionnent hyper bien et vite pour notre boulot, inventant des schémas comptables hyper alambiqués pour déterminer le chiffre d'affaire de prestations de plus en plus compliquées et tordues ayant comme seule vocation de faire cracher au bassinet toujours un peu plus les gens, pardon, les clients. Allez, le temps passe, les trentenaires vieillissent, la crise empire donc l'espoir arrive . . .