lundi, novembre 17, 2008

Sujet polémique


Je le concède, je suis un bourrin de béotien: je ne connais rien en matière de peinture. Je me soigne comme je peux: ma chère et tendre essaye de me faire toucher du doigt certains concepts, de me faire approcher la magie de certaines œuvres contemporaines, mais rien n'y fait. Je suis complètement imperméable à la peinture du XXème siècle.
Notre dernière tentative a été un échec cuisant: nous avons visité le saint du saint de l'art contemporain: le MoMA (Modern Museum of Art) à New-York. Elena était au bord des larmes devant certaines œuvres, mais en ce qui me concerne, l'ennui fut total. Pourtant, bardé de bonnes intentions, j'ai écouté religieusement l'audioguide qui devait entrouvrir pour moi les arcanes du milieu, et ai lu avec la plus profonde attention les notices explicatives.
Rien. Nada. Je ne sens rien. C'est bien simple, je me sens aussi proche d'un fan d'art moderne que d'un mec de droite lisant le Figaro. Notez que ces deux groupes d'individus se recouvrent largement, d'ailleurs.

Enfin, pour tout vous dire, je ne sens pas exactement rien devant ces toiles. Une pensée de plus en plus précise s'est faite même jour au fil de la visite chronologique, alors que les oeuvres devenaient de plus en plus abstraites. Petit à petit, une voix me murmurait de plus en plus clairement:
Petit Vincent, petit Vincent... Dis moi, petit Vincent, petit Vincent... Mais bordel à la fin est-ce qu'on se foutrait pas complètement de ta gueule? Est-ce que tu n'es pas là, concentré comme un blaireau, à essayer de donner un sens à de grands n'importe quoi? Tu te rends compte que tu es en train de te prendre la tête pour savoir pourquoi un petit con prétentieux à attaché ce costard au mur? (Véridique.)
Alors je sais, depuis la jurisprudence Duchamp, mettre des trucs de la vie quotidienne dans une expo est censé nous faire réfléchir sur ce que c'est que l'art exactement. Si vous voulez mon avis, ça pue la tartufferie à des kilomètres, c't'histoire! Je veux bien que les deux-trois premiers ready-made (c'est le terme technique, que ce bon audioguide m'a appris) aient eu leur intérêt, mais de là à en produire à la chaine! Et si l'amateur d'art a besoin d'une roue de vélo à 100000 euros dans son salon pour réfléchir au sens de l'art, ça en dit long sur le niveau du mec. Tu bosserais pas dans la finance, toi?

Alors entendons-nous bien. Je vous parle des concepts vraiment récents là, pas des Picasso ou des Dali qui restent intéressants, et souvent beaux au plus grand nombre (dont il se trouve que je fais partie). Non, je parle des trucs hardcores: un étalage de poussière par terre ou des pièces de ferrailles pour citer les plus évidentes. Mais pour moi, même Warhol ou Kandinski, c'est franchement limite. A part que certaines de leurs pièces sont hyper connues. On peut par exemple se demander ce que les 36 peintures de boîtes apportent, à part un effet marketing.
Et c'est justement ça qui me gène. J'ai l'impression que ce type d'art se résume souvent à une formule marketing.
- Bonjour, je suis Duchamp, et j'ai décidé de m'interroger sur la définition de l'art: donne moi 500000 euros pour une pissotière.
- Bonjour,je suis Kandinski, et j'ai décidé que les formes, ça sert à rien: donne moi un million pour mon gribouillage!
- Salut, c'est Mondrian. Moi, mon kiff, c'est les traits noirs à la règle qui se croisent sur fond blanc. Je te mets un peu de couleur, et tu me files une baraque?
- Yo, c'est Newman. Moi j'ai eu un choc quand j'ai décidé des "zips", des lignes droites verticales sur fond rouge, et c'est de la balle, baby. Par contre, une fois, un con qui m'a acheté une toile hyper cher m'a demandé de l'expliquer pour quelques amis à lui. Je l'ai insulté. M'abaisser à ça...
Et le conservateur de musée, ou la fan éclairé, de se mettre à frétiller devant ces concepts follement novateurs et provocants. Ohohoh, pas de forme, mais c'est fou ça! Ben mon coco, tu as gagné: tu seras riche toute ta vie, et tu l'as bien mérité alors!

Oui, je sais, je suis injuste, mais ça fait du bien quand tu as l'impression d'être le dernier des imbéciles, celui qui ne comprend rien au milieu d'une foule fascinée! Dans le fond, je n'ai rien contre le fait que des mecs s'éclatent à peindre ce qu'ils veulent, à développer les concepts qui les éclatent. Je suis même prêt à accepter l'idée qu'il y ait une petite minorité sur Terre, hyper érudite et sincèrement passionnée, qui vibre au diapason devant les nouveautés du domaine.

Mais j'aime pas ne pas comprendre/ressentir. Je sais qu'il ne faut pas voir ça au travers le prisme scientifique de la "compréhension". Je veux dire que, par exemple, je n'apprécie pas la danse, la musique classique, où la peinture d'avant 1920, mais je comprend tout à fait que des gens puissent se passionner pour ces domaines. Et j'ai même du respect pour eux. Rien de tel pour l'art moderne. Surtout dans cette sorte de mécanisme pervers, où:
  • on te donne l'impression que nombreux sont ceux qui comprennent/ressentent. (Est-ce vrai, ou est-ce du bluff?);
  • il s'agit (sur le papier) d'un domaine provocateur/novateur/anticonformiste pour qui je devrais avoir la plus grande sympathie;
  • il me semble que l'art moderne te dit, quelque part: "prend ça dans ta gueule, et vois si tu es assez malin et ouvert pour capter quelque chose. Si tu n'y arrives pas, tant pis, tu ne fais pas partie des Élus." Te voila piégé: le fait que tu ne comprennes pas (comme tant d'autres) fait partie du concept;
  • la société est aux pieds de ces grands "artistes". Leurs œuvres sont devenues des objets de spéculation aux prix insensés, les musées présentant les tableaux les plus connus ne désemplissent pas, et elles font l'unanimité, à droite comme à gauche.
Dans ces conditions, j'arrête là l'hypocrisie et clame haut et fort que je n'y comprend rien, que je ne trouve pas ça beau, que ça ne me fait rien ressentir du tout et ne me fait m'interroger sur rien. Ça m'emmerde et je vous emmerde!

Chers lecteurs, j'attends avec impatience vos commentaires constructifs. Mais avant de me traiter de tous les noms (Ele vient de me traiter de nazi, c'est assez indépassable), je vous invite à regarder les highlights du Moma. Si vous trouvez sincèrement beau, ou intéressant, des trucs à partir de la page 10, vous avez mon plus grand respect.
Votre,
Le boulet.

2 commentaires:

matray a dit…

Bah je suis bien d'accord. L'art moderne ne me fait pas ressentir grand chose non plus. A la limite ses oeuvres les plus ingénieuses ou polémiques font elles tourner mes méninges quelques minutes... Mais ce "marché" est trés fermé et les oeuvres ne deviennent "interessantes ou géniales" qu"une fois reconnues dans les catalogues par de grosses sommes... Bref c'est un marché et ceux qui estiment et ecrivent sur ces oeuvres sont aussi souvent ceux qui les achétent ou en possédent d'autres du même artiste. Le grand jeux dans ce milieu est de trouver la perle rare pas cher qui vendra beaucoup plus tard. J'ai un exemple pas loin de moi, les "jeanspezial" qui dés qu'ils exposent, certains grands conservateur ou grands prof viennent acheter leurs plus grosses pièces quelques minutes avant l'ouverture du vernissage sans demander ou même négocier un prix. Ils arrivent, achétent tout et se pavannent durant l'expo comme des mécènes en faisant une pub pas possibles sur des oeuvres et des artistes qu'ils n'avaient pratiquemment jamais vu à part dans quelques lignes de journaux evénementiels... Sait-on jamais ! quelqu'un inventera peut être un mot pour les définir et alors là !!!!

Anonyme a dit…

que dire. chaque fois que je lis ce post j'ai tellement de trucs à dire que mon cerveau de blonde ne suit pas et il crame. donc je dis rien! mais je prépare une contre-attaque dans l'ombre... hé hé hé hé hé!